Le Prince chrétien de Constantin aux royautés barbares
La conversion du monde antique au christianisme ne modifia pas la position centrale du Prince au sein de son État. Loin de remettre en cause les fondements traditionnels du pouvoir, la nouvelle religion offrit des arguments supplémentaires pour légitimer le souverain dans la mesure où il incarnait et appliquait les valeurs du christianisme dans sa vie personnelle comme dans son action publique. Les élites chrétiennes mirent rapidement au service du pouvoir la rhétorique de la justification divine tant pour exalter le souverain que l’inviter à conformer ses actes à la parole du Christ. Dans la représentation du pouvoir par les contemporains lettrés et dans son autoreprésentation à travers les textes, les monuments et les images, le souverain assuma le modèle mis à sa disposition, quitte à en jouer pour servir les besoin de l’heure.
Après avoir abordé en 2008 la question de la christianisation du monde antique analysée dans ses aspects documentaires et régionaux, puis en 2013 celle du passage des dieux civiques aux saints patrons qui constitua moins une succession fonctionnelle qu’un hiatus dans la vie communautaire, l’université de Paris Nanterre a mené en octobre 2016 une réflexion collective, internationale et transversale sur les relations entre le Prince et le christianisme dans le contexte de l’Empire tardif et des royaumes issus de sa dislocation. Le propos fut non seulement de mesurer l’influence de la religion dans l’idéalisation du pouvoir, mais encore d’étendre les perspectives de recherche aux principaux domaines d’exercice de l’autorité suprême. L’image du Prince se refléta en effet dans ses rapports avec les élites et avec les marges, avec les fidèles chrétiens et non-chrétiens, avec ses adversaires intérieurs et extérieurs. Entre le IVe et le VIIIe siècle, la notion de Prince chrétien constitua peut-être moins une donnée du réel qu’une revendication à illustrer et à défendre.
Volume édité par Sylvain DESTEPHEN, Bruno DUMÉZIL et Hervé INGLEBERT