Les perles ordonnées : des vertus du Sultan Barqūq (784-801/1382-1399)
Al-Durr al-naḍīd fī manāqib al-Malik al-Ẓāhir Abī Saʿīd
Les perles ordonnées est un petit traité inédit de 45 folios, un unicum, sans doute autographe, conservé à la Bibliothèque nationale de Berlin. Dédié au sultan mamelouk Barqūq (784-801/1382-99), il ressort d’une littérature panégyrique généralement connue sous le nom de manāqib (vertus, qualités), c’est-à-dire une littérature à caractère laudatif destinée à faire l’éloge du sujet décrit. Le but de l’auteur, en chantant les louanges de Barqūq, était surtout de légitimer sa prise de pouvoir en le replaçant dans une longue lignée de sultans mamelouks, tout en profitant de cette occasion pour se rapprocher du sultan et lui faire valoir ses propres compétences de juriste. L’ouvrage est composé d’une préface et de trois chapitres. Le premier est un bref résumé des règnes des sultans mamelouks bahrites, de l’avènement de la dynastie en 648/1250 à la prise de pouvoir par Barqūq en 784/1382 ; le deuxième comprend une suite de trente-deux questions et réponses juridiques sur des sujets variés qui concernent aussi bien des piliers de l’islam (prière, aumône légale, jeûne, pèlerinage) que les questions de témoignage en justice, achats de biens, héritage, femmes, esclaves, divorce ou chasse, le but étant d’aider le sultan à « tester » les connaissances des juristes qui l’entourent ; le troisième chapitre fait l’éloge des vertus de Barqūq.
Au travers de ce traité transparaissent quelques événements marquants du début du règne de ce sultan – notamment la célébration de certaines fêtes égyptiennes y compris chrétiennes –, mais aussi et surtout un discours de légitimation d’un pouvoir acquis par la force. L’image qui se dégage est celle d’un souverain investi par le calife, épris de justice et de religion, capable d’assurer protection et prospérité à ses sujets, sachant s’entourer des conseils avisés des oulémas, en général, et des juristes, en particulier.